L’artiste Jean-Guillaume Mathiaut investit la galerie Bastok Lessel

Nicolas Milon, AD, Mai 24, 2024
Avec Eden, l’artiste et architecte Jean-Guillaume Mathiaut s’empare de chaque recoin de la galerie et nous transporte dans un voyage immersif et sensoriel, une parenthèse enchantée où chaque étage recèle d’histoires à raconter.
 
Et si l’humanité, c’était la forêt ? À écouter Jean-Guillaume Mathiaut, enfant des hautes futaies, on saisit qu’il y puise toute celle qui est la sienne. Car d’humanité, il n’en manque pas. Il suffit de l’entendre parler du chêne, « le roi de la forêt », qu’il compare au cerf, cet autre roi de la forêt, pour comprendre qu’il les porte haut dans sa vision du monde qui nous entoure. De sa voix douce qui accélère parfois, l’artiste multidisciplinaire, designer et architecte, comme s’il s’exprimait en leur nom, s’efface pour se faire le porte-voix de ces espèces, végétale et animale, qui font la forêt plus qu’elles ne la peuplent et qu’il souffre de voir trop peu admirées, racontées, respectées ou juste entendues.
 
L’homme, au parcours semé d’embûches mais aussi de renaissances multiples, de rencontres fondatrices et d’une foi inexpugnable en l’essence brute et primitive de la forêt comme vérité indépassable, grandit dans la forêt de Fontainebleau. Il y développe un lien profond avec la nature depuis son enfance et y installe naturellement son atelier pour y puiser une inspiration et une énergie qu’il transpose dans chacun de ses ouvrages. Il y récupère troncs d’arbres fossilisés, morceaux d'écorce sacrifiés, branches abandonnées et chutes de tempêtes qu’il métamorphose ensuite en « meubles-paysages », leur offrant ainsi une seconde vie. Car là est la base de sa pratique : ne jamais couper la forêt vivante mais attendre qu’elle lui fasse don de ce qu’elle a à lui proposer, au moment où elle l’aura choisi. Jean-Guillaume Mathiaut tourne ainsi autour de la mise en forme de la matière, dans son état le plus authentique. Chaque pièce est unique, travaillée à lame vive pour tenir des coupes parfaites.
 
 

Dans son atelier peuplé de bancs Sculpture, de bibliothèques Échelle, de coffres à jouets Cité radieuse ou de chaises Fétiche fabriqués à la main, Jean-Guillaume Mathiaut vise la justesse et la simplicité des formes. C’est ce lieu magique qu’il recrée en partie sur les quatre niveaux de la galerie fondée par Tom-David Bastok et Dylan Lessel – « des amis », tient-il à préciser, et l’on sait l’importance de ce mot pour lui. La visite s’effectue comme une traversée, menant d’un Jardin de Sculptures à un Bureau d'Architecte, en passant par un Cabinet de Curiosités, pour finalement aboutir à la genèse de son œuvre – une Cabane. La cabane occupe une place centrale dans l’œuvre de cet architecte, qui ne cesse de la réinventer, entre construction légère et objet habitable, usant de jeux d’échelle et de proportions pour créer un refuge éphémère vu à travers des yeux d’enfant. Isamu Noguchi n’est jamais loin, Constantin Brancusi non plus, de même que les traditions artistiques de l’art tribal africain et océanien, en témoignent les mobiles, totems, masques et assises Okibo, qui peuplent la visite. Le ravissement de la galerie Bastok Lessel par l'artiste, designer, sculpteur, architecte Jean-Guillaume Mathiaut, courrez-y vite.